En fait, il n'y a pas que dans les films où il pleut lorsque quelque chose de grave arrive.
Aujourd'hui a été une longue journée. Assurément la pire depuis ces 6 premiers jours de 2011. Ce matin à 9h30 tapantes, on nous a annoncé la terrible nouvelle. Hier soir, Monsieur ***** est mort. Monsieur ***** était mon professeur de littérature. Alors bien sûr, vous pouvez imaginer tout ce que vous voulez et surtout ne pas comprendre pourquoi ça me touche. Alors que c'est évident.
Je n'ai pas envie d'expliciter clairement ce qui s'est passé. Je n'ai pas envie d'étaler le dernier évènement de sa vie ici, aussi tragique fut-il. Mais le fait est que, avec les.. éléments que nous avons eu, pour moi, cet homme est mort mais quelque part, pas en vain. Mort d'avoir aimer et peut être aussi de peur de rester seul. Mais pour lui comme n'importe qui, je ne cesserai de penser que cette action était égoïste. Depuis ce matin, je n'arrête pas d'imaginer ce qui a pu se passer, ce qu'il a pu penser lors de ces derniers instants. Quelles étaient ces pensées ? Où a t-il trouvé le courage ? J'ai la réponse à cette dernière question. Mais je ne comprends toujours pas. Je me sens même fautive. Peut être que si, pour ma part en tout cas, j'avais été une meilleure élève...
Très franchement, comme tout professeur, tout être humain, Monsieur ***** avait ses défauts comme ses qualités. En tant qu'élèves, bien sûr, on ne voyait que ses défauts. Et j'avais beau les critiquer, je n'ai cependant jamais remis en cause ses aptitudes à faire cours. C'était un excellent professeur, et on ne lui rendait pas, parce qu'il faut dire que ses cours étaient plutôt soporifiques. Les jours où on arrivait à suivre, on pouvait se rendre compte de la richesse de son savoir. Vous savez, lorsqu'un prof vous fait remarquer quelque chose que vous n'auriez sûrement pas interpréter comme ça malgré le fait que vous soyez en Terminale Littéraire... J'avais beau m'endormir de temps en temps, cet avis est resté le même depuis deux ans. Enfin.. un an et quart. La preuve, malgré la moitié de mon année précédente à dormir, la littérature a été la seule matière au bac où j'ai eu plus de la moyenne.
Ce qui me déprime, c'est que maintenant je perds tout espoir de réussite au bac litté' 2011. Quand j'ai vu que je l'avais encore en septembre, je me suis dit "c'est bon, je suis assurée d'avoir un 15 en littérature au bac cette année". Je comptais même sur ses conseils pour mes choix de livres pour mon bac français que je repasse. Et maintenant ? Là, c'est la partie où je le sens comme un abandon. Surtout qu'avec ce lycée merdique, on aura pas un autre prof avant un mois, et surtout pas aussi compétent...
Notre professeur de philo nous a dit que la cause principale était sûrement la solitude. Alors, au bout des 30 minutes de silence où nous étions tous sans voix, l'une d'entre nous a demandé: si la solitude est la cause de tout ça, comment l'éviter ?. La réponse de ma prof a été quasi immédiate: avoir des amis. Et personnellement, j'ai beau avoir des amis, je ne me sens pas à l'abri de la solitude pour autant. J'ai peut être tort, je ne sais pas. Ce que je sais, c'est que je me suis déjà sentie seule même entourée.
Ma prof d'anglais de l'an dernier nous a dit que le meilleur moyen de lui rendre "hommage" était de garder notre humour. Elle a bien raison. L'une des raisons pour laquelle j'appréciais beaucoup ce prof était son humour sarcastique, presque noir, pour nous dire les choses et aussi cette manière classe et blessante de nous remettre en place, le tout dans un beau français. Ses soudains mots crus en pleine analyse de texte aussi. Elle nous a raconté une ou deux anecdotes, et il faut dire que je ne le voyais pas du tout comme ça. Ils nous donnaient tous l'impression d'être quelqu'un de très renfermé et secret. Alors entendre cette facette de lui, lisant l'horoscope du Parisien aux collègues, et ayant beaucoup d'humour, ça nous a fait sourire :)
Cette même prof d'anglais nous a aussi dit qu'il adorait Madame Bovary de Gustave Flaubert. Alors, c'est tout con, mais j'avais un peu de temps avant mon baby sitting. Ne voulant surtout pas rentrer chez moi, j'ai été faire un tour au Quartier Latin, chose qui ne mettait pas arrivée depuis très longtemps alors que c'est sûrement le quartier de Paris que je préfère. Bref, je l'ai un peu pensé comme un genre de rédemption. Passer du temps dans un quartier regorgeant de livres et donc de littérature, qu'est ce que je pouvais faire de plus.. ?
J'ai commencé à fouiner, en commençant par les magasins du bas, comme d'habitude. J'ai pu tout faire en une heure même si je ne suis pas restée autant que je l'aurais voulu, job oblige.
Je me suis mis en tête de trouver une magnifique édition de Madame Bovary. Que ce soit ridicule ou inutile voire hypocrite juste parce que c'était un livre qu'il appréciait, rien à foutre. Puisque je me sens impuissante (et je le suis), c'est tout ce que j'ai à faire. Ca et décrocher mon 15 en littérature. Je lui dois bien ça. De toute façon, je me suis toujours dit que c'est... c'était à lui que j'aurais envoyé une lettre de remerciements en cas de réussite au bac. Car, de mes profs de l'an dernier, c'était de loin le meilleur même s'il faut dire que ce n'était pas difficile vu la palette de ma première terminale... Bref, année dernière ou année actuelle, la lettre aurait été pour lui.
Il s'est arrêté de pleuvoir aux alentours de 12h, quand nous avons tous extérioriser la nouvelle comme on pouvait.
Le temps est resté gris comme notre moral.
On croit toujours qu'une personne est éternelle.
Jusqu'à ce qu'elle meurt.
Et cette réalité est encore plus cruelle quand cette personne s'en va brutalement.
Le choc aurait été moins grand
si cela c'était passé autrement...