Et tous les vendredis, j'ai soif d'écriture. La cause ? Un cours. Et c'est assez choquant comme situation. Nous, étudiants, bien que les sujets (dans la plupart des cas... normalement) nous plaisent, les cours auxquels nous assistons peuvent s'avérer extrêmement CHIANTS. Mais la vraie chiantitude hein. L'impression que l'heure ne passe pas et tout. Alors, lorsqu'un cours, et plus spécialement un professeur, vous donne envie de rester dans la salle pendant plus longtemps qu'une trop courte heure et demie, ça relève de l'exceptionnel.
Ecriture à contraintes. C'est l'intitulé de ce cours. Le professeur s'appelle Cécile Ladjali. Vous pouvez la chercher sur Fnac, parce qu'elle écrit des livres. Des romans. Elle est tellement cool (et pas seulement côté vestimentaire) que j'ai décidé d'en lire 1 ou 2. Si ce qu'elle écrit est comme ce qu'elle dit, dans sa manière de s'exprimer et de sentir les choses, mon achat ne risque pas d'être vain. Elle a ce que j'appelle une belle âme. Je ne vais pas vous cacher que j'ai un peu la flemme de vous expliquer ce que je veux dire, parce que c'est quelque chose qui se ressent. Dans le cas présent, ça se voit dans son art de manier les mots. Des mots qui vont tout de suite faire écho et vous faire apprécier la situation.
On ne va pas se mentir. Un cours se veut toujours intéressant. On fait des études en partie parce que l'on a soif de connaissances. Un étudiant est donc conditionné pour recevoir. Une bonne partie du reste dépend de la personne qui enseigne. L'Histoire n'a jamais été ma matière favorite, bien qu'elle soit au dessus des maths dans le classement. Mais prenez Stéphane Bern. Bon, il n'est pas prof d'Histoire, mais la passion qu'il met à vous raconter les faits passés me donne envie de boire ses paroles et de m'intéresser au sujet abordé.
Avec Mme Ladjali c'est pareil et même mieux (quoique... S. Bern quand même). Ce qui rend ce cours aussi attractif, c'est qu'il n'est pas vraiment le stéréotype du "cours" non plus. Avec un thème chaque semaine, on aborde des auteurs en tout genre, de toute époque (d'une critique de Brett Easton Ellis à un poème de Paul Valéry dans le même ensemble), et en bonne partie contemporains ce qui déjà donne un coup de jeune aux classiques que j'étudie en temps normal. Ensuite, dès le premier cours, elle annonce la couleur (pas seulement le thème "littérature érotique vs littérature pornographique"). Il s'agit avant tout d'élargir notre culture. De fouiner, de nous rendre curieux en passant en revue plusieurs extraits de textes critiques, poétiques, journalistiques... Et elle les commente de manière si simple, si facile. Personnellement, je suis tellement absorbée que je ne prends même pas de notes et pourtant, quelle perte.
Et donc, j'ai faim de culture après ça. Je veux lire tout et n'importe quoi, m'intéresser à tout encore plus que d'habitude. Parce qu'il y a tant de choses que je n'ai pas encore vues, tant de belles choses que je n'ai pas encore lues. Je blâme le temps mais c'est un bien piètre coupable. Finalement, la technologie est peut-être une maladie. Tous mes livres s'ouvrent à moi lorsque mon ordinateur, le disque dur de ma vie, est en veille prolongée. Je n'ose même pas dire "éteint" car il l'est rarement. Puis je dors et *pop*, le bouton vire à nouveau au bleu et me voilà en train d'écouter de la nouvelle musique, regarder les épisodes de ces séries que j'ai commencé, et par dessus tout, à lire encore et toujours plus... de mangas. Je me peine moi-même. Je m'en plains à demi, après tout, musique, séries tv and co. restent tout de même une source de culture, mais elles sont tellement minimes comparées à la richesse des livres. J'ai des listes "à découvrir" de tout mais pas une plus conséquente que celle de mes livres. Et chaque visite dans une librairie la rend un peu plus longue. Même les magazines que j'achète, une fois feuilletés, sont empilés et en attente d'une lecture sérieuse de ma part. A quoi ça sert de me ruiner pour les garder sur ma commode ? Question inutile, vraiment.
Et donc, je profite de l'été pour lire ce que j'ai en attente. J'y arrive plutôt bien mais ça déborde toujours d'un été sur l'autre. Pendant mes cours, je ne préfère pas trop toucher à mes lectures personnelles pour rester concentrée sur les oeuvres que j'ai au programme. Et je n'aime pas non plus lire plusieurs livres en même temps. Ce serait comme boire plusieurs verres de vins susceptibles d'être les millésimes de ma vie. Quant à écrire... eh bien, j'écris ici. Et je trouve ça toujours aussi dérangeant d'écrire sur papier, et pour moi seule. Pas que je tienne absolument à exposer ma vie ici (haha), mais une feuille blanche est beaucoup plus inquisitrice. C'est "moi" qui regarde "moi-même". Et c'est affreusement dérangeant. C'est peut-être bizarre et lâche de ne pas vouloir me voir nue, d'observer mes mécanismes. Ici, vous avez droit à "moi", que j'aime beaucoup, qui rend très bien. "Moi-même" est mon côté tourmenté, qui ne cesse de pointer les défauts, d'ouvrir les blessures pour mieux les guérir (ce qui est assez noble quelque part...) et je n'ai pas forcément envie de relire ça. Ici, je prends plaisir à relire ce que je pense à propos de tout et de rien, de ce que je vois, de ce qui se passe ailleurs et les répercussions sur moi en tant que personne en société. Sur papier, y'en aurait que pour ma gueule, temple de Narcisse en visite chez Hadès. L'Enfer de Stina. Quel intérêt ? Alors bien sûr, puisque je n'ai pas de blog papier, quand "moi-même" prend le clavier, ça filtre ici, il faut bien que j'extériorise après tout.
Mais, je m'égare ! Donc, je me dis que je n'ai pas le temps, et que de toute façon, le livre ne peut pas s'enfuir. Mais en fait, même quand je ne fais rien, je me sens occupée. Cercle vicieux. Esprit labyrinthe. Va falloir casser des murs. J'ai presque honte de mon bagage littéraire (au sens scolaire du terme). Je sauve les meubles avec les extraits de textes étudiés d'année en année depuis quoi, 10 ans ? Et puis finalement, quand on est littéraire, on finit par ressasser, tellement que les classiques deviennent automatiques. Mais le j'en ai entendu parlé a ses limites. Ca, et on manque cruellement de littérature générale en licence de lettres modernes (aussi parce qu'il y a un parcours de licence dédié mais c'est pas une raison [mauvaise foi]). Et en ce qui concerne mes lectures personnelles, je ne suis pas sûre que placer Charles Bukowski ou Matt Ruff apporte quelque chose au développement de x devoir, ni même que ce soit possible de les placer. Pas vraiment baudelairien tout ça.
Alors voilà. A la fac, il y a des cours un peu hors du lot, en général 1 à 2 par semestre, qui me rendent heureuse d'être étudiante, de rencontrer des profs différents et passionnés par ce qu'ils font. Qui ont ce goût de découvrir ce que de jeunes gens pensent, d'observer les diverses perspectives possibles d'un même sujet. Ce qui est dommage, c'est qu'il y en ait si peu. On est enfermés dans ces pratiques tout ça parce qu'il nous faut des bases et des modèles par lesquels on est tous passés. Je ne suis jamais autant productive qu'avec les choses qui suscitent mon intérêt, des choses inédites pour moi jusqu'à maintenant... autant dire que ce n'est pas souvent le cas. Il faut faire des dissertations, et montrer que justement, on n'assiste pas aux cours pour rien, que l'enseignement du professeur n'est pas inutile, et lui montrer à lui aussi qu'on est pas là en touriste, que l'on n'attend pas que le temps passe et qu'on a enregistré et (avec de la chance) compris ce qu'il a dit pendant 2 heures. Je préfère sublimer des tabous et parler de bibliothèques (dixit le type d'exercice que j'ai dans mon cours d'écriture). Mais bon. Ce sont des humains tout comme nous. On ne peut pas demander à un prof d'être extraverti, de rendre son cours plus intéressant pour nous sur demande. De plus, je ne suis pas toute seule dans la salle, forcément, il y a d'autres étudiants avec des paillettes dans les yeux là où moi je n'en ai pas forcément.
En bref: les cours d'écritures, c'est très cool.
Les profs qui font ces cours-là aussi.
Et puis, parfois on a moins de chance. On a d'autres TD quoi.